20.9.18 Le fond du canniveau


Jeudi 20 septembre, Manali – Darcha

Après un déjeuner spartiate à l’hôtel, la journée a bien commencé avec une ascension sur une route très large et en bon état. Cela n’a pas tardé à se gâter avec de nombreuses portions empierrées suite, la plupart du temps, à des éboulements.



Puis la route passe à travers d’agréables forêts qui me font bien penser à la Suisse. Le goudron se fait nettement plus étroit et comme j’ai envie d’acheter quelques provisions, je jette un coup d’œil sur un stand bordant la route et au moment de prendre le prochain virage à droite, horreur : je ne peux plus maîtriser ma moto, je pars sur le bas-côté orné de grands cailloux. Impossible de freiner convenablement et l’adrénaline monte à son paroxysme. Je ne peux plus rien faire et vois s’approcher un énorme trou de canalisation devant moi. Et c’est le choc. Le devant de ma moto plonge et je vole par-dessus le guidon, que j’ai bien enfoncé. Abasourdi, je constate que je peux me relever et m’empresse d’aller voir la moto. Elle n’a pas fière allure mais elle ne semble pas totalement défoncée.

Une groupe de motards que je venais de dépasser s’arrête et un type me demande si je suis ok. Je lui réponds que oui, j’enlève mes gants, mon casque et ma veste car il fait chaud et l’émotion n’arrange rien. Un motard me tend une bouteille d’eau et j’accepte volontiers une gorgée. Puis trois motards tentent de sortir la moto de sa mauvaise posture. Les attaches des sacoches sont à moitié arrachées et une sacoche empêche de bouger la moto. Un motard se met à l’enlever et deux autres tentent de sortir l’avant. Ils n’y parviennent pas car le trou empêche d’avoir une bonne prise. Encore sous le coup de l’émotion, je me mets alors à cheval sur le trou et relève de toutes mes forces la bécane sur un bord en terre. Deux personnes la tiennent à l’arrière et une au guidon. Mais ce dernier est tourné dans le mauvais sens et il a fallu quelques longues secondes avant que le motard barbu le mette dans une position correcte pour assurer la moto. Une fois la moto en sécurité, un type me fait remarquer que le pneu arrière est à plat.

Giuseppe est devant et je n’ai pas de réseau pour l’appeler. Je ne me fais pas de souci car je sais qu’il va revenir sur ses pas. Les motards restent encore un moment et à l’arrivée de Giuseppe, ils s’en vont après que je les eus remerciés. Puis commence la longue réparation. Je repère un endroit ombragé sous un arbre et nous poussons la moto jusque-là. Le moteur est heureusement reparti mais la bulle est brisée, la fourche certainement faussée et le guidon très en avant. Toutefois, l’important est de réparer la roue. Heureusement, la moto a une béquille centrale et nous avons la clef qui permet de dévisser la roue. Nous avons tout le matériel nécessaire. Nous avons bien vite repéré un énorme clou en plein milieu de la bande de roulement. Je parviens à le retirer à l’aide d’une pince. Le démontage se fait difficilement, mais on peut dire normalement. Nous appliquons une rustine car la chambre à air de rechange ne semble pas de la bonne taille.

Le premier trou réparé, nous constatons que le clou a traversé toute la chambre à air et il y a un autre trou de l’autre côté. Après l’avoir également réparé, c’est le dégoût : il y a une multitude de perforations et nous n’avons pas de rustine assez grande. Nous optons donc pour monter quand même la chambre à air de réserve de la mauvaise taille. 

Heureusement que j’ai du savon avec moi car cela facilite grandement le remontage. Je suis également satisfait des démonte-pneus que j’ai emmenés depuis chez moi.

J’ai certainement perdu le contrôle de la moto en raison de la crevaison. Je suis heureux de ne pas être blessé et que la moto puisse repartir. Je n'ose pas imaginer ce qui se serait passé  si une telle mésaventure s'était produite à un autre endroit au bord d'un précipice. 
Le guidon est de travers et très en avant, mais cela va aller. Deux kilomètre plus loin, c’est le poste de contrôle des laisser-passer et celui de Giuseppe est déjà timbré car cet animal ne s’était même pas rendu compte avant le check-point que je ne le suivais pas.



Le reste de l’ascension du col de Rohtang est très jolie, malgré mon guidon tordu. J’ai un peu perdu confiance en moi et suis nettement moins enhardi pour dépasser les véhicules et suivre le bord de la route car il n’y a évidemment aucune sécurité et des précipices vertigineux.

A mi-chemin, nous nous arrêtons pour manger un petit en-cas et parvenons sans problème au sommet du col qui culmine à 3986 mètres. 

Après une brève séance photo, nous descendons de l’autre côté, où la route est nettement moins bonne. Il y a de très longues zones d’éboulement en travaux. Au village au pied de l’autre versant, nous devons passer par un check-point où les surveillants relèvent nos numéros de plaques et de passeport.

Puis la route s’améliore nettement dans la vallée jusqu’à Tendi. Les paysages montagneux sont splendides et les gens ont l’air sympathique. Nous faisons une halte avant la dernière station, éloignée de 365 km de la suivante. 

Comme les quinze litres de nos réservoirs ne suffiront pas, nous remplissons des sacs d’urgences, dispensés par le prévoyant Giuseppe, avec trois fois six litres dans nos bagages. A la station-service, nous échangeons quelques mots avec des membres du troupeau de Danois qui font un raid moto organisé, ce qui ne me donne absolument pas envie.

Nous entamons l’ascension du prochain col et passons par Keylong et Jispa, où nous nous arrêtons pour boire un café dans un campement pour touristes.

Nous décidons de poursuivre jusqu’à Darcha, où il y a un autre check-point.

Nous n’irons pas plus loin car le prochain campement est à 40 km et la nuit ne va pas tarder à tomber.


Nous optons pour un campement de tentes mais il n’y a pas deux lits, les tentes sont dégueulasses et un jeune garçon nous propose de prendre la chambre qui se trouve dans leur maison d’habitation.

Giuseppe l’emmène à l’arrière et nous prenons possession des lieux. Nous soupons dans la chambre des hôtes et discutons un bon moment. 

Le seul problème, c’est que Giuseppe ne se sent pas bien et semble fiévreux. Nous décidons de prévoir le départ à 7h30 au plus tard le lendemain matin, car la route est très longue jusqu’à Leh.

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